jeudi 25 juin 2009

Niger : La récupération des terres « inutiles » offre un nouvel espoir aux paysannes marginalisées d’Afrique de l’Ouest

Le Sahel en passe de devenir un front horticole avec des rendements estimés à près de 1.200 $ US par hectare

Niamey, Niger – L'Institut international de recherches sur les cultures dans les zones tropicales semi-arides (ICRISAT) a développé en Afrique de l'Ouest une technique innovante pour récupérer les terres agricoles très dégradées et abandonnées et leur redonner une bonne productivité.

Cette avancée est importante dans cette zone soudano-sahélienne semi-aride dont le peu de terres fertiles fait l'objet d'une surexploitation pour produire toujours plus de nourriture pour une population croissante, avec en toile de fond les variations climatiques qui menacent une production agricole déjà fragile et la sécurité alimentaire.

De plus, les terres récupérées et allouées à des femmes nécessiteuses et marginalisées leur permettent de recouvrer leurs droits socio-économiques et de gagner leur vie grâce à l'agriculture.

Selon le Prof. Dov Pasternak, chercheur à l'ICRISAT, « des études ont montré que dans la zone tropicale sèche ouest africaine, 13 à 15 pour cent des enfants souffrent de malnutrition aiguë ». « En travaillant avec les femmes à produire des arbres fruitiers et légumes locaux, nous avons non seulement contribué à restaurer leur dignité, mais leur avons aussi permis de mieux subvenir aux besoins de leurs enfants et de leurs familles tout en gagnant un peu d'argent. »

Toujours selon le Professeur Pasternak, plus de la moitié des sols sahéliens seraient très dégradés et perdraient peu à peu leurs matières nutritives et organiques sous les effets de l'érosion éolienne et hydrique. Sur de nombreuses terres abandonnées à travers le Niger, on se trouverait ainsi face à des sols latéritiques croûteux difficiles à cultiver. Les sécheresses sont responsables de l'échec des cultures deux ans sur cinq.

Les conditions climatiques très dures du Sahel, associées à une pression démographique croissante, affectent sérieusement la production agricole dans cette zone. Au Niger, la pression démographique a progressivement conduit à la formation de très petites exploitations agricoles dont la propriété et l'exploitation reviennent généralement aux hommes. Ceci a eu pour effet de « chasser » les femmes des champs, les laissant sans ressources pour s'occuper décemment de leurs familles et gagner des revenus.

Selon une étude menée par l'Institut international pour l'environnement et le xéveloppement, « on enregistre dans (certaines régions du Niger) l'émergence d'une première génération de femmes ne travaillant pas la terre. Ce processus commence quand le gamana d'une femme est cultivé par son mari car le champ en question est si petit que l'assistance de la femme n'est nécessaire que pour certains types de récoltes. A Jiratawa, nous avons découvert une seconde génération de femmes sans terre. Elles n'ont jamais travaillé aux champs car elles n'ont pas eu la possibilité d'aider leurs mamans dans leurs gamana vu que celles-ci n'avaient pas non plus de terres. Elles ne savent même pas comment semer des graines ! »

En 2004, le Gouvernement du Niger, dans ses efforts pour aider les femmes à pratiquer l'agriculture et éviter qu'elles ne s'appauvrissent, a introduit un Code Rural afin de réglementer l'accès et l'utilisation de la terre et d'autres ressources naturelles. Le régime foncier est régi par un ensemble de lois disparates relevant du domaine coutumier, du droit islamique et du Code Civil. Le Code Rural est en fait conçu pour permettre aux femmes de posséder et de disposer de la terre à leur guise. Cependant, la tendance montre pour l'instant que, le plus souvent, les terres attribuées aux femmes sont les moins productives, souvent abandonnées, en somme des terres que les hommes ne peuvent pas exploiter.

L'ICRISAT développe une gamme de techniques pour aider les Nigériennes à transformer leurs terres dénudées, improductives et encroûtées en des champs fertiles. Ces techniques offrent une approche intégrée de la production alimentaire et comprennent notamment : la restauration de la fertilité des terres dégradées, la gestion de l'eau pour cette zone semi-aride et la récupération des terres par l'utilisation d'espèces d'arbres résistantes à la sécheresse.

Les chercheurs de l'ICRISAT ont initié les femmes à la création d'un environnement favorable à la plantation d'arbres assurant un réel enracinement et leur ont montré comment gérer les sols pour éviter leur saturation en eau. Les paysans, de leur côté, ont appris à collecter les eaux de pluie dans les champs en utilisant de petits dispositifs de collecte ou des trous « zai » permettant de garder l'eau sur de longues périodes après la pluie. Les trous zai conservent aussi le sol et le composte contribuant ainsi à la croissance d'arbres fruitiers et légumineux adaptés au milieu, à enracinement profond et à forte valeur nutritive comme la Pomme du Sahel, le Ziziphus Mauritania et le Moringa, Moringa stenopetala.

Le fruit de la Pomme du Sahel est riche en fer, en calcium et en chlore et contient dix fois plus de vitamine C que la pomme ordinaire. Quant aux feuilles du Moringa, légume le plus populaire du Niger, elles ont sept fois plus de vitamine C que les oranges, quatre fois plus de vitamine A que les carottes, quatre fois plus de calcium que le lait, trois fois plus de magnésium que les bananes et deux fois plus de protéines que le lait.

Ces espèces d'arbres et d'autres, en cours d'expérimentation pour la récupération des terres dégradées en Afrique de l'Ouest, sont résistantes à la sécheresse, à une forte salinité du sol et à sa saturation en eau. Elles promettent de faire, des vastes étendues de terres dégradées ouest africaines, le nouveau front horticole de l'Afrique. L'ICRISAT estime la valeur des fruits et légumes produits à partir de ces espèces locales à environ 1.200 $ US par hectare.

A propos de l'ICRISAT:

L'Institut international de recherches sur les cultures dans les zones tropicales semi-arides (ICRISAT) est une organisation à but non lucratif et apolitique qui, avec divers partenaires stratégiques à travers le monde, mène des recherches agricoles innovantes et soutient le renforcement des capacités pour un développement durable. Sa mission principale est d'aider 600 millions de pauvres à vaincre la faim et la pauvreté et à faire face à un environnement dégradé dans les zones tropicales semi-arides en pratiquant une meilleure agriculture. L'ICRISAT est l'un des 15 centres financés par le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR). Visitez notre site www.icrisat.org

A propos du CGIAR:

Fondé en 1971, le CGIAR est un partenariat stratégique entre des pays, des organisations internationales et régionales et des fondations du secteur privé pour le financement de 15 centres internationaux. Le CGIAR, en partenariat avec les systèmes nationaux de recherche agricole, la société civile et le secteur privé, oeuvre pour la promotion d'un développement agricole durable par des recherches scientifiques de haut niveau visant les populations pauvres, une sécurité alimentaire renforcée, une meilleure alimentation et santé, des revenus plus élevés et une meilleure gestion des ressources naturelles. Pour de plus amples informations, veuillez visiter le site www.cgiar.org

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